Une finance qui repense la valeur
Longtemps, la finance s’est concentrée sur l’accumulation de capital, privilégier le retour sur investissement, parfois au détriment des écosystèmes et du bien-être. Mais alors qu’urgence écologique et crises sociales s’accentuent, un tournant se dessine : la finance régénérative. Elle vise non plus à piller, mais à cultiver : restaurer les sols, renforcer la biodiversité, renforcer la cohésion sociale et régénérer les territoires. Il ne s’agit plus seulement de “limiter les dégâts” ou de compenser, mais de générer des bénéfices écologiques et sociaux concrets : sols restaurés, biodiversité renforcée, emplois durables, circuits économiques locaux renforcés.
Les fonds à impact : pionniers de la transition
De plus en plus de fonds d’investissement orientent leurs capitaux vers des projets alignés avec les limites planétaires.
- Mirova, société de gestion française, finance des projets d’énergie renouvelable, de mobilité durable ou encore d’agriculture régénérative.
- Time for the Planet, société à mission, mobilise l’épargne citoyenne pour créer et déployer des entreprises luttant contre le changement climatique à l’échelle mondiale.
- Des acteurs comme LITA.co ou Enerfip permettent aux particuliers de placer leur argent directement dans des projets à fort impact écologique et social.
Le label ISR (Investissement Socialement Responsable), créé en 2016 et désormais placé en tête des références européennes, représente près de 800 milliards d’euros d’encours (source Le Monde.fr). Une réforme récente, entrée en vigueur progressivement dès mars 2024, renforce les critères ESG, exclu les hydrocarbures non conventionnels, et met davantage l’accent sur l’engagement actionnarial (source Le Monde.fr+2Collectif Startups Industrielles France+2. Environ 20 % des fonds ISR actuels pourraient même perdre leur label s’ils ne s’adaptent pas (lire LeMonde.fr)
Les monnaies locales : réinjecter la valeur dans les territoires
À côté de ces acteurs de la finance “institutionnelle”, les monnaies locales complémentaires (MLC) jouent un rôle fort dans la vie économique des territoires. En France, il existait plus de 80 monnaies locales complémentaires en circulation en 2020.
Certaines se distinguent particulièrement :
- Le Tookets en Nouvelle-Aquitaine, le Cairn, ou encore l’Eusko au Pays basque (la plus importante monnaie locale d’Europe) favorisent la consommation locale, soutiennent les commerces de proximité et réancrent la richesse produite dans les territoires.
- À Lyon, la Gonette, et à Grenoble, favorisent les circuits courts, la consommation locale, et intègrent des valeurs solidaires — redirigeant la richesse vers des projets à utilité sociale ou culturelle
- Par exemple, la Doume, monnaie locale du Puy‑de‑Dôme, a vu plus de 224 000 unités en circulation et un peu plus de 1 100 utilisateurs en septembre 2023.
- Beaucoup d’autres initiatives (Luciole, Buzuk, etc.) témoignent d’un maillage local dense et diversifié.
Temps long, transformation profonde
Contrairement à la finance traditionnelle, souvent orientée vers les résultats à très court terme, la finance régénérative mise sur le tempo long. Restaurer un écosystème, construire un circuit économique local, redonner du pouvoir aux communautés, tout cela prend des années. Mais les bénéfices, eux, sont durables.
Pourquoi ça compte :
- Redéfinir la valeur : un euro investi dans la régénération vaut beaucoup plus s’il revitalise des sols, soutient un producteur ou recrée du lien social.
- Répondre aux urgences : crises climatiques et sociales exigent des outils financiers qui ne se contentent pas de “faire moins mal”, mais qui reconstruisent.